Avec le solo Clameurs, le chorégraphe d’origine syrienne Mithkal Alzghaïr continue d’interroger nos sociétés occidentales. Il y présente une image de l’homme comme figure centrale d’un monde fragmenté.

« Ce que le monde vit aujourd’hui et l’avenir vers lequel nous nous dirigeons m’incite à me questionner sur les formes de domestication et les transformations que cela opère sur le corps. »

Toute forme de domination et de contrôle, le pouvoir et les lois, imposent au corps des contraintes. Comment cela influence-t-il ce que les corps vivent? Comment résister face à ces interdictions, ces limitations, ces frontières? Dans Clameurs, Mithkal Alzghaïr s’interroge sur la manière dont le corps réagit dans la confrontation à la contrainte imposée. Ce questionnement suscite un portrait double : celui d’un homme soumis et silencieux, mais aussi révolté avec un besoin de « clamer » et de briser les barrières.

Plus précisément, le chorégraphe s’intéresse à cet endroit de transition d’une réalité à une autre et à la manière dont le corps vit ces transformations dans l’existence. Entre passé et futur, réalité et fiction, Clameurs explore cet espace du temps suspendu.

Sur les sonorités de l’oud, instrument identifié traditionnel et oriental, Mithkal Alzghaïr joue sur le rythme et le mouvement en perpétuelle transformation. Il expérimente ce qui le stimule et le limite, à l’image de ce que vit l’homme : liberté et restriction, violence et humanité. Il impose au corps des contraintes telles que la pression, le resserrement, le poids, pour trouver des espaces de liberté, de légèreté. Pris par la répétition, il atteint une forme de transe émotionnelle et physique sur une scène aux reflets miroir, découpée en fragments.

« À un moment je les rassemble et cela donne la carte du monde, cette image du monde dans lequel on vit et comment on a envie de recréer sans frontière, sans fragmentation, de penser la réalité d’un monde et de l’humanité ensemble. »

Car au-delà de la critique apparente, Mithkal Alzghaïr ne cesse de cultiver « un désir de vivre dans une utopie de liberté et d’égalité », et ce solo est une manière de mettre fin à ce monde fragilisé. Toujours dans un entre-deux, Clameurs offre un portrait de l’homme d’aujourd’hui et une image de l’homme de demain.