Skinless est une histoire d’amour profondément sensorielle : au plateau, deux amants anonymes, fragiles créatures pâles en combinaison de latex et issues d’un monde de carton, se cherchent, se trouvent, se repoussent, s’aiment et finalement se séparent…

Skinless, présenté en coréalisation avec le BNM au Théâtre des calanques dans le cadre du festival Actoral 2024 rassemble trois performeurs autour d’un dispositif conçu comme une arène expérimentale à 360°. Avec tout autour, des dizaines de tonnes de déchets, résidus d’un monde en déréliction, où se joue la puissante évocation du désir et de sa perte.

La double nature du travail de Théo Mercier - sculpture et mise en scène - a abouti à concevoir en collaboration avec Paprec (le géant du recyclage), un « paysage sculpté », qui est à la fois une scénographie et une sculpture où le public évolue entre des murailles métalliques et un sol de carton. Comme les ruines d’un monde concassé fictif, qui est aussi le nôtre.

C’est une pièce sur la rupture amoureuse. Skinless ne parle pas de notre rapport aux déchets, mais elle se concentre sur une histoire d’amour, du désir, des amours finies, des amours cassées. Skinless interroge notre relation à ce qui reste.

© Erwan Fichou

Peu à peu, les corps desquament, les peaux tombent. Et Skinless fait du déshabillage amoureux le prélude érotique d’une fin déjà certaine : Ces déchets sont les peaux mortes du désir.

L’évolution des amants se fait aussi sous le regard fasciné d’une troisième créature, « une vieille machine autoritaire, obsolète et hyper seule » issue d’un monde de métal. Cette instance d’un contrôle jaloux place la scène sous le signe de la surveillance et de l’alarme, donnant soudain au duo amoureux valeur de liberté transgressive.

Ces déchets sont une matière-personnage […] les performeurs sont les habitants fictifs qui peuplent ces mondes. Ils sont proches des poubelles, ils font partie de la poubelle.

Toute la pièce apparaît ainsi guidée par ces déchets, carton ou métal, définissant une double sensorialité visuelle, plastique, mais aussi musicale et chorégraphique.

On a vraiment travaillé à ce que les mouvements soient ceux d’un état de transformation permanente. Les danseurs racontent une relation en métamorphose infinie. Je dirige mes danseurs de manière très plastique. J’essaie de leur parler de sensations, de dureté et de mollesse.

L’oeuvre de Théo Mercier questionne de ce fait les rapports entre matière et humanité, elle envisage, au cœur de cette relation, les questions de production, ses moyens, son impact environnemental. Les déchets apparaissent incontournables, par leur caractère omniprésent et infini :

Ils sont déjà-là, localement, et en très grande quantité, mais on ne veut pas les voir […] je souhaite travailler sur ces coulisses du monde, les mettre dans la lumière.

© Erwan Fichou

Je veux aussi faire du plateau un espace d’implication collective. Et que le public soit actif, prenant physiquement part à ce qui est en jeu. Un public debout, autour de ce monde de poubelles.

Et qui se réconcilie sensuellement avec les déchets.

SKINLESS

24 & 25 septembre 2024
au Théâtre des Calanques, Marseille
En coréalisation avec le Ballet national de Marseille
dans le cadre du Festival Actoral
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